Article paru sur le site de la commune de Durlinsdorf  http://perso.orange.fr/a2tmos/anecdote.html

 

 

Le soldat Richert

 

Mon beau-père, Henri MATTLER (1901 - 1981), père de mon épouse Henriette, me relatait bien des fois son séjour en Allemagne, où sa famille se trouvait réfugiée durant la guerre de 1914-18.Henri, qui avait alors 15 ans, ses frères et soeurs, et ses parents, Emile MATTLER et Marie née STOCKER, avaient été accueillis dans une vieille maison du village d' Eberbach, dans la vallée du Neckar. Son principal plaisir, nous racontait-il, était alors d'aller se baigner dans les eaux du Neckar. Mais il ne nous a jamais parlé de la visite, durant ce séjour, d'un soldat alsacien, nommé Dominique RICHERT (1893 - 1977), de Saint-Ulrich, et dont, comme par hasard, j'ai découvert l'anecdote dans le livre qui transcrit le manuscrit relatant avec une rigueur extrème ses campagnes meurtrières comme soldat dans l'armée allemande. Ce livre, de La Nuée Bleue s'intitule "Cahiers d'un survivant" - "Un soldat dans l'Europe en guerre 1914-1918" - traduit de l'allemand par Marc Schublin, nous livre les passages suivants :

* page 149: fin octobre 1916

Mon tour vint de partir en permission. J'aurais été heureux de rentrer chez moi, comme tous mes autres camarades. Une famille alsacienne de Durlingsdorf, nommée Mattler, alors réfugiée à Eberbach dans la vallée du Neckar, m'avait invité par lettre à venir chez eux, si je ne savais pas où aller. Longtemps, je ne sus trop que répondre. Finalement, je me décidai à partir, car j'étais trop heureux de ne plus sentir, pour un temps, le joug militaire. La perspective d'un long voyage me réjouissait également. J'emportai donc mon livret de permission et me munis d'un peu de ravitaillement, pris congé de mes camarades et me mis gaiement en route.

* page 150:

Je descendis à l'auberge Koch où, au deuxième étage, habitait la famille Mattler. Bien que je ne connaisse de la famille que monsieur Mattler, je fus accueilli par tous de façon très gentille. Quelle joie pour moi de pouvoir vivre et être logé quelques jours d'une façon aussi agréable. La famille Mattler et moi-même prenions nos repas à l'auberge. La nourriture n'était pas particulièrement riche mais, comparée à la tambouille du front, elle était splendide. Le pain n'était pas bien meilleur que le pain militaire, ni plus abondant, car le pain, la viande et le beurre étaient déjà rationnés et étaient perçus sur cartes de ravitaillement, tant de grammes par tête. Ce qui me plaisait le plus, c'était le bon lit ; car depuis  janvier, c'est-à-dire depuis neuf mois, je ne m'étais jamais déshabillé pour dormir dans un lit. Toujours le dur lit de camp de fer, dans les abris. Par beau temps,  je faisais des excursions dans les environs du Neckar, dans les montagnes, vers les ruines des châteaux dominant Eberbach, d'où l'on avait une vue magnifique sur la vallée. Les jours s'écoulaient trop vite. Je fis également la connaissance de plusieurs autres familles de réfugiés alsaciens, toutes très gentilles à  mon égard.

Les jeunes filles alsaciennes rivalisaient d'amabilités et plusieurs d'entre elles laissaient deviner qu'elles seraient volontiers devenues la bonne amie d'un soldat de leur région. Tout cela faisait plaisir, naturellement. J'échangeai des adresses avec plusieurs d'entre elles en pensant que la correspondance apporterait quelque diversion dans la vie fastidieuse des tranchées. Lorsque les dix jours à Eberbach tirèrent à leur fin, je pris congé de la famille Mattler et des familles alsaciennes amies.

* page 186: septembre 1917

Je partis donc à Eberbach, pour arriver chez la famille Mattler qui me reçut très amicalement. Je demandai avec insistance de préparer de l'eau chaude pour pouvoir me baigner et ainsi me débarrasser de mes poux. Je passai des journées très agréables. Mais, question nourriture, c'était la misère. On ne mangeait jamais à sa faim. Comme je n'avais plus de mouchoirs, je me rendis dans un magasin assez important pour en acheter deux. « S'il vous plaît, avez-vous le bon ? » fit le vendeur lorsque je demandai les mouchoirs. Je ne savais pas de quoi il parlait. Le propriétaire du magasin éclaira ma lanterne. Il n'avait pas le droit, disait-il, de vendre quoi que ce soit sans bon d'achat, faute de quoi on fermerait sa boutique. On pouvait obtenir des bons à la mairie. Après bien des palabres, ce monsieur accepta enfin de me vendre deux mouchoirs sans formalités. Mais je dus lui promettre de n'en parler à personne.

L'année 1917 était une bonne année pour la récolte des fruits. En voyageant, je voyais partout des pommiers et des poiriers lourdement chargés. Le voisin de la famille Mattler avait une entreprise de production de cidre et il me demanda si je ne voulais pas lui donner un coup de main. Il était surchargé de travail, disait-il, et était prêt à me payer deux marks par jour. Cela ne m'intéressait pas du tout; d'abord, je n'avais plus l'habitude de travailler, et puis j'étais parti en permission pour me reposer et non pour épuiser mes forces encore bien affaiblies. Enfin, je voulais passer les six derniers jours de mon congé chez mon ami Zanger en Rhénanie.

Je pris congé de la famille Mattler et descendis la vallée du Rhin.

Le soldat Richert aura été sur tous les fronts, France, Roumanie, Pologne, Russie, jusqu'à sa désertion vers les lignes françaises en 1918. Il retrouvera son village Saint-Ulrich, pour y redevenir agriculteur. Fera-t-il par la suite une visite à la famille MATTLER ? On le pense, mais on ne le sait pas !

Hubert Hoff.

 

 

Suite à mon intervention, Ulrich Richert a bien voulu apporté quelques précisions sur la parution de l'article sur le site http://www.durlinsdorf.net/.
Ulrich Richert a contacté Hubert Hoff.par téléphone et se sont promis de se retrouver autour d'un verre de vin blanc d'alsace.

 

FAMILLE MATTLER

Comment l'a-t-on connu?

C'était pendant le service militaire de grand père Dominique Richert qu'ils ont fait connaissance .

(voir livre "Une saga familiale page 173, 5ième alinéa et suite...).

A partir de là, les famille Mattler et Richert ont continué à se fréquenter.

Je me rappelle que dans ma jeunesse ( 9 ou 10 ans ) j'ai accompagné mon père à Durlindorf.La maison familiale étant occupée par une demoiselle célibataire  dont j'ai oublié le nom .

Joséphine , la soeur de Dominique a été la marraine d'une des filles Mattler .
Je crois qu'elle s'appelait Henriette .Elle était mariée avec un employé de banque et habitait Mulhouse.

Lorsqu'elle a été baptisée Marraine avait naturellement participé à la fête à Durlindorf .

M. Mattler Père aurait aimé la marier à un de ses neveux.

La pauvre Marraine avait toutes les peines du monde à échapper à ses ardeurs;

Une des filles Mattler avait épousé un gars de Hindlingen .Veuve d'assez bonne heure , elle a refait sa vie .

Ulrich a aussi connu Mme Morgan qui habitait à Altkirch. Veuve elle avait un ami qui sortait avec elle le dimanche.Je l'ai retrouvée lors d'un repas que nous avons pris ensemble au restaurant Bertelé à Leymen.

Lors de la parution du livre de papa , elle m'avait contacté au téléphone pour en parler.

octobre 2006